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Un blog pierre sèche

Ce blogue est un carnet de maçon pierre sèche (dit murailleur). Vous pouvez visualiser quelques-unes de mes réalisations, et obtenir de nombreuses informations sur la technique de la pierre sèche. C'est également un outil pour tous les auto-constructeurs.

This blog allows one to obtain and share information about dry stone. It is written in the form of a notebook of a landscape gardener and shows my projects (walls, retaining walls, calades, stairs) as well as my landscaping work.


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1 novembre 2008

Le terrassement

 

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Nous sommes ici dans le cadre d’une restauration d’un mur de soutènement à Colmars-les-Alpes (Alpes-de-Haute-Provence).

 

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État des lieux

Le mur n’est pas ruiné de la même façon sur toute sa longueur : à certains endroits il a complètement disparu, d’autre parties sont envahies de végétation. Il reste de toute façon le talus sur lequel il va être possible de « s’appuyer » pour prévoir l’intervention.  

La première chose à faire est un état des lieux :

Mesurez la longueur du mur, sa hauteur, vérifiez que les pierres soient toujours présentes sur le site.

Aux endroits où le mur a complètement disparu faites de même en mesurant cette fois le talus afin de déterminer la hauteur finale du mur et prévoir la quantité de terre à décaisser. Inscrivez alors dans le talus, si nécessaire avec un cordeau, la ligne qui matérialisera la ligne de façade du futur mur.

Assurez vous également de la possibilité d’approvisionnement en pierre si il venait à vous en manquer. Ici, un pierrier issu des activités agricoles pourra être utilisé.

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Pierrier

Les raisons de la ruine d’un mur sont multiples, bien les appréhender lors de l’état des lieux évite les surprises. Cela permet par exemple de mieux gérer le calcul du temps nécessaire à la restauration. En effet, en plus du travail propre au mur, chacune de ces raisons sera à corriger afin de ne pas reproduire les défauts qui ont conduit le mur à la ruine.

 

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Souche d’arbre dans le mur


 

Contrairement à cette souche, toutes les causes de l’éboulement du mur ne sont pas visibles à ce moment des travaux. Elles ne deviendront évidentes que mises à jour par le terrassement.

 

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Début du terrasement


Une fois décidé où construire le mur dans le talus, le terrassement peut commencer. Il s’agit alors de décaisser* en dégageant dans le talus l’emplacement dans lequel le mur va être reconstruit.

Notez sur la photo que la terre est remontée, pour cela le talus est creusé de haut en bas afin de réduire l’effort de travail.

 

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Après « quelques » coups de pioches. Notez que les pierres sont également triées. Celles-ci sont par contre stockées en bas du mur.

 

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Les fondations d'origine


Nous sommes arrivés au niveau des fondations, Une pierre glissée (indiquée par un A sur la photo) nous permet de comprendre la raison de l’éboulement du mur à ce niveau. Il faudra replacer cette pierre dans l’alignement en évitant de reproduire les conditions qui ont permis son mouvement.

 

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Racines ayant renversé le mur


Un peu plus loin, les racines d’un arbre ont grossi dans la maçonnerie du mur, expliquant là encore sont éboulement. Les racines doivent être coupées avant la reconstruction (si l’on ne veut pas couper les racines il est également possible selon les cas de réaliser un arc de décharge).

 

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Une première partie du terrassement est terminée.


 

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Souche d’arbre

Le terrassement se poursuit sur une portion où le mur ne va être restauré que partiellement. En effet, le bas du mur est encore solide et ne nécessite pas de reprise. Il s’agit ici d’extraire une souche d’érable champêtre.

 

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Déssouchage


L’on nettoie d’abord le tour de la souche, cela permet de couper la plupart des racines qui en partent latéralement.

 

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Une fois la souche bien dégagée, et ses racines principales coupées, il est possible de s’aider d’un tire-fort pour finir de l’extraire  (ou si les racines pivotantes qui restent ne sont pas trop résistantes une simple sangle à cliquet de camion comme ici).

 

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La souche enlevée, le mur est purgé du reste de ses racines. Ce qui oblige souvent à démonter une partie conséquente de mur.


 

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Vue générale du terrassement achevé


Le mur apparaît en creux dans le talus, on parle de « l’âme du mur ». Le vide ainsi dégagé correspond à l’épaisseur du mur auquel on ajoute la profondeur du drain (ici jusqu’à 90 cm).

 

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Mise en place des fondations


Avant de construire il reste encore à vérifier et le cas échéant à reprendre les fondations. Si nécessaire les blocs de fondation sont réalignés, ou repris pour avoir le bon pendage* et un appui stable. Ici la remise en place d’un bloc de fondation poussé par la croissance des racines vues plus haut.

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Les fondations vérifiées, la construction peut commencer. Ici début de la construction du mur vu de dessus.

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Au même moment vu de face

 

Ci-dessous le mur terminé.

 

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* décaisser : creuser dans un sol afin d’y dessiner une forme en creux.

* pendage : le pendage d’une pierre désigne l’angle par rapport à l’horizontale que décrivent ses faces supérieures et inférieures, aussi appelées face d’assises. Le pendage permet le fruit.

 

 

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14 décembre 2011

Couronnement végétal d'un soutènement

Le couronnement d’un mur en pierre sèche a plusieurs fonctions techniques :

Il pèse sur la structure maçonnée du mur. L’obtention de l’équilibre par la répartition du poids étant le seul liant utilisé en maçonnerie à pierre sèche, cette fonction est primordiale.

Il protège le mur des écoulements d’eau de ruissellement, et des infiltrations de terre par son sommet.

Il finit le mur dans sa hauteur, aucun poids ne s’exerce sur lui. Il n’est donc pas calé lui-même par une masse supérieure qui le maintient en place, il est ainsi la plupart du temps composé de pierres plus lourdes, ayant une inertie propre suffisante pour ne pas être sujettes au mouvement.

Il doit ainsi surtout résister aux passages des bêtes et des hommes, surtout lorsque le mur n’est pas d’une grande hauteur.

La stratégie pour obtenir cette stabilité est en fait très diverse, car peu de terroirs offrent la possibilité d’utiliser de bonnes grosses pierres bien lourdes pour achever le mur.

La plus emblématique est le couronnement en pierres plates clavées. Ici à Taulignan dans le sud de la Drôme.

 

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Une variante, rencontrée au Beausset dans le Var sur le domaine de la Maison de la nature des quatre frères, que l’on pourrait nommer en écaille de poisson. Les pierres plates ne sont pas suffisamment conséquentes pour permettre un couronnement clavé, les bâtisseurs ont développé cette variante très efficace.

 

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Dans beaucoup de régions la stratégie utilisée est celle du talutage, le talus chapote le couronnement et le protège des piétinements.

 

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Talus de cailloutis sur mur de soutènement

 

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Talus de cailloutis recouvert de terre sur un mur de soutènement peu haut

Le talutage peut être renforcé par une végétalisation adéquate afin de tenir la terre.

Cette végétalisation peut être défensive et l’utilisation de plantes piquantes décourage les passages. C’est le cas pour ce mur observé à Gallargues-le-Montueux dans le Gard.

 

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Pour reproduire un tel couronnement 

Une fois le mur construit et le couronnement posé, il reste à mettre en place le talus.

On commence par recouvrir le haut du mur d’une couche conséquente de cailloutis. Cette couche aura l’effet d’un drain. Elle filtre et retarde l’infiltration des particules de terre dans la structure du mur. Elle a également un effet drainant qui va conditionner l’implantation des végétaux en créant une zone sèche et peu riche en substrat. 

 

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On finit par recouvrir cette couche de cailloutis par une couche de terre végétale.

 

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C’est dans cette terre que sont plantés les végétaux. Ici des figuiers de Barbarie qui décourageront tout passage.

 

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Il est bien sûr possible d’utiliser ce talus pour implanter un jardin sec, iris, succulentes, graminées, plantes rampantes, tout dépendra de vos goûts, de la région et de l'exposition.

 

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10 avril 2011

Utiliser les affleurements rocheux

Lors de la construction de murs en pierre sèche il est idéal de les fonder sur les affleurements rocheux. Quitte à changer vos plans d’aménagement, les roches dégagées lors du terrassement préparatif vous permettront de construire des murs solides s’inscrivant dans le paysage et optimisant l’utilisation de l’espace.

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Etat initial du talus avant intervention

Ce fut le cas lors de ce chantier de restauration d’un mur de soutènement en pierre sèche. Le mur initial s’appuyait sur la roche et était souligné par un talus envahit par les chênes kermès.

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Le décaissement du talus découvre un banc rocheux

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Le démontage du mur découvre le banc rocheux superieur sur lequel il était fondé

Lors du décaissement et du nettoyage du talus la structure rocheuse du talus a été mise à jour. Plusieurs couches de roches se superposent, celle sur laquelle s’appuyait le mur initial surplombe une couche inférieure qui empiète sur la plate bande inférieure.

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L'escalier s'inscrit dans la roche

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Le mur et l'escalier sont construits simultanément

Plutôt que de faire disparaître cet affleurement pour égaliser le terrain, il va être utilisé pour implanter un escalier. L’escalier s’inscrit dans la roche tout en y trouvant appui.

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Au bout du mur, à l'ombre du figuier, un banc en pierre sèche est insallé. Le chantier est terminé.

 

9 août 2011

Retirer le lierre d'un mur en pierre sèche

Lorsqu'un mur en pierre sèche est envahi par le lierre il menace à plus ou moins longue échéance ruine. En effet les tiges de lierre en grossissant disjointent les pierres qui perdent ainsi leur équilibre. Cependant la présence du lierre sur un mur en pierre sèche est à double effet, dans un premier temps le lierre s'accroche aux pierres et les maintient liées entre elles en renforçant leur cohésion.

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Il se crée ainsi un équilibre lierre/maçonnerie pierre sèche que l'on ne dérange pas sans risquer de fragiliser le mur. Ce n'est que lorsque le lierre a pris beaucoup de vigueur que l'équilibre du mur est menacé, ses tiges font alors tomber les pierres.

 

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Enlever le lierre déjà implanté sur un mur n'est pas une affaire si simple qu'il y parait. Il faut réussir à réduire le lierre sans déséquilibrer les pierres du mur.

Pour cela un seul outil le sécateur, et de la patience car il s'agit de couper tout ce qui entoure le mur sans faire bouger une seule pierre !

Pour cela les tiges de lierre seront tronçonnées autant de fois qu'il le faudra pour ne pas forcer sur les parties inclues dans la maçonnerie. Commencez chaque action doucement et domptez votre force, dès qu'une pierre bouge arrêtez tout et jouez du sécateur pour enlever la portion de tige sans ébranler les pierres.

 

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Tige de lierre dans la maçonnerie

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On ne peut pas tirer sur la tige sans que les pierres bougent. Une partie de la tige s'enfonce dans le mur

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Section des parties hors mur de la tige

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Enlever les parties sectionnées

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Recommencer l'opération sur toutes les parties

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La partie insérée dans le mur est laissée, on n'y touche pas

Il arrive que des cales tombent lorsque l'on tire sur le lierre, repérez bien où elles étaient et surtout remettez les exactement là et comme elles étaient placées.

 

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Une cale est tombée lors du nettoyage

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Elle est remise immédiatement à sa place avant d'en avoir perdu l'emplacement

Le nettoyage terminé, tout n'est pas encore gagné.

Il vous reste tout d'abord à effectuer la même opération l'année suivante pour éviter que le lierre ne reprenne le dessus. Vous aurez également à gérer le mur lui même, en effet les tiges inclues dans la maçonnerie vont pourrir et disparaitre. Elles laissent un vide qui peut destabiliser certaines pierres, vous devrez alors les recaler afin que le mur tienne.

 

23 août 2011

Restauration d'un pierrier à Taulignan

Un pierrier, aussi appelé clapas ou clapier, est un tas de pierre.

 

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Lors des travaux de la terre, les pierres sont extraites du sol au fur et à mesure de leur apparition à l'air libre. Ce sont des pierres dites de croute qui se détachent de la roche mère et que les travaux agricoles exhument.

 

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Dans la vigne voisine, les pierres abondent

Le pierrier a pour principale fonction de stocker ces pierres hors de la zone de culture. Pour des raisons pratiques le but de ce stockage est d'utiliser le moins de superficie possible au moindre effort et sans demander trop de temps. Les endroits choisis sont les parties les plus incultes ou les moins gênantes pour les travaux agricoles de la propriété, affleurement rocheux, bords de chemin, limites de propriété.

 

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Le pierrier en cours de refection

De nos jours il est coutume d'apporter tout ce que l'on considère comme un déchet à la déchetterie, les pierres et les gravats y sont apportés à grand renfort de gaz-oil et de cout de travail pour ceux qui vont devoir les trier puis les stocker… ailleurs. Jusqu'à peu il ne serait venu à l'idée de personne de transporter des pierres pour les mettre en décharge, elles étaient stockées en pierrier, en fait en attente d'un probable travail de maçonnerie ultérieur, de réfection d'un chemin ou d'entretien d'un drain.

 

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Ornière comblée à l'aide des cailloutis stockés

Lors de la réalisation d'un de ces projets il suffisait alors de venir se servir dans le tas où les pierres étaient déjà triées. On y jetait également tous les déchets inertes, principalement les vaisselles cassées, bétons et terres cuites (en fait tous ce qui se retrouve également dans les drains de l'arrière des murs de soutènement en pierre sèche).

 

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On trouve souvent des os, ils rencontrent dans les pierriers et les drains les conditions parfaites pour fossiliser

Les techniques mises en œuvre pour la construction varient du simple stockage en tas au pierrier parementé. C'est le cas du pierrier restauré ici, il s'agit d'une construction de maçonnerie à pierres sèches car les pierres sont bâties et organisées lors de la réalisation du parement et lors du remplissage de l'intérieur du pierrier. Cela reste néanmoins une technique très sommaire et à la portée de tous.

 

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De mémoire du propriétaire, le pierrier est le résultat d'un stockage commencé dans les années 50, il stocke les pierres récoltées dans le jardin potager en bord de chemin. Il poursuit et s'adosse à un mur de clôture construit bien avant (l'aménagement en pierre sèche du lieu semble daté du milieu XVIIIè siècle, comme en témoigne un enclos avec bassin et source où apparait un millésime.

 

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Millésime du bassin (copyright Isabelle Biolley)


Le pierrier s'est éboulé en deux points

 

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Point 1 : le parement s'est éventré, une pierre de fondation a basculé, les cailloutis ont coulé hors du pierrier. On le remonte en donnant du fruit aux pierres et en les croisant bien. Le fruit suffit à contenir la poussée des plus petites pierres stockées à l'arrière. On procède en montant le parement avec les plus grosses pierres aussi appelées pierres à bâtir, et en remplissant ensuite l'intérieur avec les pierres plus petites impropres à la construction.

 

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Point 2 : attention un parement peut en cacher un autre. Ici le parement est tombé et révèle un autre parement juste derrière, ceci nous indique que le pierrier a été agrandi pour contenir de nouvelles pierres exhumées lors des labours.

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La restauration terminée

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19 octobre 2011

Pierre sèche et histoire d'eau

Restauration d'un aménagement en pierre sèche en Ardèche cévenole. Le terrain est plein sud, très pentu et entièrement aménagé en pierre sèche. Les murs font souvent plus de trois mètres de haut afin de dégager des espaces suffisants pour la culture.

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Le lieu dit signifie source captée, et en effet c’est un petit paradis, protégé du mistral, bien ensoleillé, et surtout très bien arrosé grâce aux sources. Les bâtiments datent du 17ème et il semble qu’ils aient été relais de chasse pour les nobles de l’époque.

Les terrains à l’arrosage accueillent encore des cultures potagères, sinon les autres terrasses sont entièrement dédiées aux châtaigniers.

 

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Etat des lieux

Le mur de l’intervention est entièrement écroulé. Il est sur un niveau inférieur dans l’alignement de plusieurs bassins où l’eau qui s’écoule de la source est stockée (fig. 1).

Lors du démontage, nous constatons que sa profondeur est largement surdimensionnée, il fait plus d’un mètre de profondeur pour une hauteur d’à peine deux mètres. Certainement afin de bien drainer le sol arrosé et de résister plus longtemps aux poussées (fig. 2). Nous respectons cette profondeur lors de la reconstruction.

 

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Le mur fait plus d'un mètre d'épaisseur

Le mur démonté permet également de découvrir un système de touvières utilisées pour arroser les jardins de façon gravitaire à partir du bassin, et pour évacuer le trop plein d’eau venant de la source. Une première touvière dirige l’eau vers le jardin pour l’arroser. Une autre, qui débouche dans le mur que nous restaurons, sert également à l’écoulement du trop plein. Chaque touvière est composée d’un sol caladé sur lequel l’eau s’écoule, de murets en pierre sur les côtés supportant une dalle qui ferme et recouvre le dispositif. Afin d’éviter que l’eau ne s’infiltre dans le sol, les calades et les murets semblent avoir été maçonnés à l’argile et non à sec.

 

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Bassin principal où débouche la source

 

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L'eau est dirigée dans les touvières qui traversent les murs de soutènement successifs

 

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Le passage des touvières dans le terrain est repérable par les dalles

 

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Shéma d'une touvière

Le terrain est entièrement imbibé par l’eau au niveau de l’éboulement. Le trop plein d’eau de la source s’y écoule et ne trouve pas de passage. Impossible de dire si le mur s’est écroulé à cause de cette eau, ou si l’eau s’est retrouvée bloquée suite à l’éboulement. Dans tous les cas le mur a été sapé de la base, les pierres de fondation se sont affaissées sur le sol ameubli jusqu’à être en contre fruit. L’effondrement du mur a suivi.

 

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Le terrain est imbibé, notez les pierres de fondation affaissées en contre fruit

Les fondations sont reprises, la sortie de la touvière est dégagée et restaurée. Il est installé plusieurs exutoires au pied du mur afin d’éviter que l’eau n’y stagne, ce qui aurait pour effet de reproduire le phénomène de sape des fondations à long terme.

 

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Plusieurs exutoires permettent l'assainissement du sol

Le mur fini

 

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Autre article sur le sujet : Le drain d'un mur de soutènement en pierre sèche.

 

2 août 2006

Réaliser un escalier volant

L'avantage d'un tel escalier réside dans l'économie d'espace qu'il permet.

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Les marches de l'escalier sont formées par des pierres très longues et relativement fines.

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Au final, moins d'un tiers de la longueur dépasse du mur et permet au pied de prendre appui.

 

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La pierre-marche, profondement incluse dans le mur, doit être parfaitement calée et solidaire du mur.

 

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Elle est aussi maintenue par le poids du mur.

 

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Quelques prises de vues de l'escalier terminé.

 

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5 septembre 2005

Mur dans un lotissement à Forcalquier

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Il s’agit d’un mur de soutènement, construit avant que ne soit rapportée la terre, au milieu d’un lotissement à Forcalquier (Alpes-de-Haute-Provence).

La mise en œuvre ne revêt aucune particularité technique particulière.

Le mur est long mais peu haut. Les pierres sorties des terrassements ne sont cependant pas évidentes à monter à sec car elles se taillent mal, et emportent, la plupart du temps, l’ouvrage vers l’avant.

Le mur délimite deux espaces : il est en limite d’un lot, sur lequel une maison est en cours de construction, et il s’inscrit également dans l’espace public du lotissement destiné à être planté en espace vert commun.

A l’emplacement du lotissement, les pierres ne manquent pas. Il s’agit d’un de ces lieux où poussaient les cabanons que l'on appelle des bories, et où il fallait retourner et ranger dix mètres cubes de pierres pour voir verdir au printemps quelques mètres carrés d’une herbe rare.

Il y a, à l’entrée du lotissement un très beau cabanon pointu, flanqué de deux grands amandiers et auquel sont accolées deux remises selon des proportions dignes du nombre d’or. Il est étonnamment mis en valeur par sa position au milieu d’un rond-point.

Un petit bout de friche du passé intouché et devenu intouchable, entouré de la nouvelle réalité goudronnée de l’espace urbain.

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UN CHANTIER COMME FORMATEUR

 Sur la plupart des chantiers, le travail de la pierre est synonyme d’espace, de silence, de solitude…

 Ca n’a pas été le cas ici : les bétonnières, le tractopelle et la radio criarde émise depuis la camionnette des placoteurs, hurlaient de concert.

L’originalité de ce projet, pour moi, tient au fait que nous avons travaillé à plusieurs. J’ai, sur ce chantier, formé mes collègues (Laurent et Angel) en leur transmettant autant que possible mes connaissances techniques.

Laurent est paysagiste : il a accepté le chantier, et n’ayant jamais pratiqué la pierre sèche avant, il a fait appel à moi pour le mener à bien. Il profite de l’occasion, ainsi qu’Angel venu donné la main, pour se former.

De mon ancien métier, je sais qu’il n’est pas de technique sans transmission. Ainsi, avoir la possibilité de la transmettre est un honneur.

En effet la technique n’est pas uniquement un moyen de faire de l’ouvrage, mais aussi un lien entre les hommes et entre les générations. Nous n’en sommes que les passeurs.

En ce qui concerne plus particulièrement la technique de la pierre sèche, il y a suffisamment de terres à retenir contre les conséquences des orages de l’été et des feux, pour que tous soient les bienvenu(e)s à la partager.

 Ce chantier m’a montré que quelques mots et des gestes appropriés, suffisent à ce qu’une personne motivée s’y mette avec intérêt, et réussisse assez vite à faire comme il faut et à y prendre plaisir.

Je partage donc avec vous les leçons de ce chantier :

La pierre sèche c’est du sérieux, il faut bosser, mais c’est un domaine qu’il ne faut pas trop mystifier : les résultats viennent très vite, à ceux qui, une fois guidés, ont envie de s’y mettre.

De plus c’est une activité solitaire qui n’exclue pas la convivialité.

Alors venez y donc nombreux !

 

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2 août 2006

Restauration d'un mur d'enclos

Nous sommes en Drôme provençale. L'enclos, entièrement construit en pierre sèche, protège un carré de terre à l'arrosage d'une quarantaine de mètres de côté. Un bassin en pierre millésimé du début XVIIIè indique que cet enclos fait partie d'un aménagement très ancien. Cette hypothèse est conforté par la très grande qualité de l'appareillage et l'utilisation de pierres non issues de l'épierrement des champs alentours, mais qui pourraient provenir d'une ancienne carrière située à moins d'un kilomètre du site.

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L'éboulement n'est pas encore conséquent, mais les dégâts ne peuvent que s'accélérer.

 

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De chaque côté de la passade, le mur s'effondre déjà sur un bon mètre.

 La difficulté de construction d'un tel mur réside dans le fait qu'il possède deux parements. Il faut être particulièrement pointilleux dans le choix des pierres. Le temps de travail en est donc augmenté ainsi que le coût. 

Réaliser de nos jours un tel ouvrage en pierre sèche (120 mètres de mur de 2 mètres de haut) demande de gros moyens.

Si vous possédez un tel ouvrage, n'hésitez pas à procéder à un entretien régulier, ainsi qu'aux réparations au fur et à mesure que les dégradations apparaissent.

Le reconstruire à l'identique, après un abandon prolongé, pourrait se révéler hors de vos moyens. Un entretien régulier vous coûtera très peu et vous permettra de continuer à profiter de sa beauté.

 

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La restauration du mur achevée.

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12 juillet 2006

Si vous avez une passade dans votre mur

La passade est une " pathologie " particulière d'un mur en pierre sèche.

Elle commence par la chute des pierres du faîte du mur.

Elle est ensuite amplifiée, par le passage répété des animaux ou des hommes (d'où son nom), et par l'infiltration de terre dans le mur.

Voici comment réparer un tel mur.

 

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 Exemple de mur atteint

 

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Le désordre de face

 

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L'état de l'intérieur du mur et du drain

 

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Tout d'abord, enlever et nettoyer tout ce qui est instable et qui résulte de l'éboulement

 

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Bien creuser aussi à l'intérieur du mur, afin de reprendre le drain

 

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Ne pas hésiter à déborder vers le bas du mur et sur les côtés de l'éboulement. En effet les pierres qui semblent bien tenir sont souvent fragilisées et déséquilibrées par le désordre

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Le démontage doit être réfléchi.

Tous les matériaux doivent en être récupérés, triés et mis en tas.

Ainsi l'on mettra à part :

- les grosses pierres, les pierres moyennes et les petites, selon qu'il s'agit de pierres de façade, pierres de maçonnerie, pierres de drain, pierres de couronnement, ou boutisses.

- récupérer aussi les feuilles et déchets végétaux, garder intactes les mottes de terre, remonter la terre qui est descendue avec l'éboulement

 

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Une fois cela fait, il ne reste plus qu'a reconstruire ! (Reportez vous aux autres articles de la rubrique " Pierre sèche en pratique " de ce blogue.)

 

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Une fois le mur terminé, il est possible d'utiliser de la chaux pour sceller les pierres de couronnement si, comme ici, les pierres ne sont pas assez grosses pour stabiliser correctement le haut du mur. Le mur en sera ainsi renforcé et la passade aura moins de chance de se répéter.

Le couronnement scellé, utilisez du géotextile au sommet du mur pour éviter que la terre ne s'infiltre dans le drain. (Vous pouvez aussi à cet effet, vous servir des feuillages récupérés au sol, en tasser une bonne couche sur laquelle vous rapporterez la terre que vous avez trié lors du nettoyage de l'éboulement). Ici le mortier de chaux, en liant les pierres sur une profondeur suffisante, aura cet effet.

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Utilisez aussi les mottes de terre enherbée pour stabiliser le terrassement au sommet du mur et former le talus

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Le mur vu du haut terrassement fini

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Vue de face.

 

29 avril 2010

Murayeurs de pères en fils

L'association "Les chemins du patrimoine", basée à Ollioules dans le Var, a organisé un atelier de restauration de murs en pierre sèche. J'ai ainsi eu, le temps d'un week-end, le plaisir de guider les premiers pas de certains des participants et de faire découvrir la technique de la maçonnerie à pierres sèches à d'autres.

 

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Les participants à l'atelier (photo Sauveur Galazzo) 

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Vue sur le rade de Toulon depuis le parc

Le lieu choisi pour la restauration est un lieu étonnant : il s'agit d'un parc paysager privé sur la commune d'Ollioules aujourd'hui à l'abandon, il a été entièrement aménagé au XIXè siècle par une famille de murailleurs, les Long.

 

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L'une des restanques du parc

Contrairement aux restanques agricoles de la région, tous les ouvrages en pierre sèche présents sur le site ont visiblement été l'objet d'une attention très particulière, et montrent un savoir faire proche de la perfection. Une fierté que l'on peut encore lire sur les pierres taillées signant les ouvrages.

 

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Signature du murailleur

Murs et calades qui dessinent le coteau sont, non seulement, en maçonnerie pierre sèche à joints vifs* très soignés, mais les pierres ont systématiquement été posées dans une recherche esthétique qui évite les lignes d'assises. Du land art avant l'heure ?

 

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Mur de soutènement de 6 mètres de haut 

Raoul Decugis, président de l'association, et curieux impénitent de tout ce qui touche à l'architecture vernaculaire, a lancé les recherches sur les Long.

Il s'agit d'une famille dont le premier ancêtre connu dans la profession, Ferdinand, Jean, André Long né en 1797 était surnommé "le murayeur", suivent une quinzaine de fils, petits fils etc, tous Long, tous recencés comme murailleurs, paveurs, maçons à pierres sèches ou tailleurs de pierre, jusqu'au dernier en activité mort en 1930.

En toute modestie, ce fut pour moi un honneur d'avoir l'occasion d'analyser la structure d'un de ces murs et de participer à la restauration d'une brèche. Ces murs sont un travail d'orfèvre.

 

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Le chantier de restauration 

 

Si vous désirez contacter l'association "Les chemins du patrimoine", acheter l'un de leurs livrets très documentés sur les petits bâtis ruraux du Var comme les fours à cade ou à chaux, les ouvrages en pierre sèche, ou sur les sentiers de randonnées, écrivez à :

Les chemins du patrimoine

à l'attention de Raoul Decugis 

348 chemin des gais Coteaux

résidence les 3 pins Bt 1

83190 Ollioules 

 

*maçonnerie à joints vifs : chaque pierre est retaillée sur toutes ses faces pour que les pierres soient ajustées entre elles sans calage.

20 octobre 2005

Mots et murailles

Dans cet article en chantier, quelques textes littéraires et autres oeuvres où l'homme cotoie, pense et utilise la pierre, et plus particulièrement la pierre sèche.

 

"Seules les pierres, pense la mort, seront longues à mourir"

 

Andrée Chedid

 

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«  On grimpe par les zig-zags d’un sentier vénérable, tantôt parmi la sécheresse de rocs brûlés, tantôt dans la pénombre de pauvres oliviers moins majestueux que partout ailleurs, (…),la chaleur cuit.(…) Un peu de terre est parfois retenue sur cette brusque chute de rocs et il faut tout un mur pour qu’un triste olivier végète ».

Louis Cappatti dans l’article : Peillon, Revue Nice Historique, 1924, p16.

« Sur les coteaux abrupts, l’homme, péniblement, a construit de solides murs en pierres sèches que le temps à vêtu de mousses et de grisaille, afin de retenir les quelques pelletées de terre meuble qu’il a jeté sur la roche compacte ou sur l’aride pierraille ».
Pierre Isnard, cité par Louis Cappatti dans l’article : A propos de l’Armanac Nissart, revue Nice Historique, 1928, p. 24. 

 
« Quelque chose craque encore dans la toiture faite de poutres et de grosses pierres plates, qui s’élevait obliquement au dessus d’eux et n’avait qu’une seule pente, le chalet étant adossé à un ressaut de roc qui remplaçait le mur du fond. (…) quelque chose craque dans la toiture, c’est que les dalles d’ardoise, étant exposées pendant le jour à la chaleur du soleil, sont fortement dilatées par elle, puis, le soir venu et le froid, se rétractent, faisant des mouvements soudains et espacés, comme si on marchait sur le toit. » p. 12
 
 « On entendait de temps en temps le tintement d’une clochette au cou d’une chèvre quelque part dans les environs. Les chalets étaient de ci de là répandus. C’est des cabanes en pierre sèche. Une des pentes de leur toit était tout enneigée de lune, l’autre se confondait avec l’ombre qu’elle projetait sur le sol. » p. 16 
C.-F. Ramuz, dans le récit: Derborence, éditions « ne varietur » pour « La Guilde du Livre », Lausanne, sans date.

Toujours de Ramuz, cette fois ci dans "Si le soleil ne revenait pas" éditions marabout, Verviers, 1978
"Oui c'est qu'il y a le lac. oh c'est raide là-bas, c'est encore plus raide qu'ici. C'est une côte au bord de l'eau, c'est comme un coté de baignoire, ça a deux cent mètres de haut. Et la terre n'y tiendrait pas toute seule, mais ils ont fait partout des murs qu'ils ont mis les uns au dessus des autres, qui la soutiennent; et où ils cultivent la vigne avec des faussoirs, remontant chaque hiver dans des hottes la terre qui est descendue.

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"Il regarde avec stupeur passer les tourbillons de l’orage et se laisse gagner peu à peu par le sommeil, précurseur de la mort. (…). Dans quelques mois lorsque la neige aura été fondue par la chaleur (…) quelque chien de pâtre retrouvera le cadavre et pas ses aboiements effrayés appellera son maître".

"Autrefois les débris humains trouvés dans la montagne devaient reposer à jamais à l’endroit où le pasteur les avait découvert. Des pierres étaient entassées sur le corps et chaque voyageur était tenu d’ajouter son caillou au monceau grandissant. Maintenant encore, le montagnard qui passe à côté de l’un de ces tombeaux antiques ne manque jamais de ramasser sa pierre pour en grossir le tas. Le mort est maintenant inconnu, peut-être même est-il resté toujours inconnu ; mais de siècle en siècle, le passant ne cesse de lui rendre hommage pour apaiser ses mânes".

RECLUS Elisée, Histoire d'une montagne: Gollion-CH, édition infolio, collection Archigraphy poche, 2011, 207p


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Si aujourd'hui, dans nos contrées, construire en pierre sèche est un acte souvent esthétique, comme partout ailleurs, à l'époque où le caddie n'existait pas, il était dicté par la nécessité pour l'homme de s'adapter à son environnement en utilisant au mieux les matériaux et les ressources qui l'entourent.

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Le film de Wang Quan An, Le mariage de Tuya, interprété par la superbe Yu Nan, prend pour décor l'environnement paysan de la province de la Mongolie Intérieure en Chine. Vous y verrez, encore en vie et en état de marche, des structures et des constructions en pierre sèche, le tout vibrant de lumière et de sentiments. 

 

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La chanson du murailleur

Le silence des mots, obscur et lent empilement de signes,
comme l’odeur de la pierre sur mes mains de retour le soir, 
au bout du mur,
est un lieu rond où je me rends, patient, visage buriné, 
écrit sur toutes les faces,
où s’ouvrent toutes les portes et qui les condamne toutes.
Le silence des mots
au bout du soir, le labeur terminé,
il est juste derrière
ce n’est pas un secret
c’est le seul lieu où je ne suis plus seul.

Louis Cagin I/05


Trois extraits, souvenirs de jardinier, trouvés dans "calendrier perpétuel" D'ernst Jünger, (Bruxelles 2006, Artgo éditeur)


"27 juin 1967: La petite économie. Dans la cour de devant les joints d’entre les pavés sont remplis de pâquerettes. En retournant le jardin, on découvre sans cesse de nouvelles pierres : il faut les exhausser. Je les réunis en un tertre, le couvre de terre et y plante de la mousse. Il commence à fleurir, la décharge s’est changée en un lieu charmant. Les algues fleurissent elles aussi ; le marbre des pierres tombales se teinte de rouge. »

"16 septembre 1970 : Le printemps humide a tout fait monté en tige : La mousse du tertre, les coloquintes, les zinnias.(…)" 

« 6 septembre 1972 : Sous la tonnelle, un jeune hérisson, qu’Indra (ndl : le chat)  a flairé et qui n’a pas tardé à disparaître.Ces petites créatures savent se dissimuler dans les jardins comme peu d’autres.Mais quels habitants ou quels visiteurs ont-ils élu mon tertre de pierres, que j’avais si richement couvert de mousse verte et qui a maintenant l’allure d’une ruine ?"


Philippe Jaccottet dans le recueil poésie à la nrf

Poids des pierres et des pensées

Songes et montagnes
N'ont pas la même balance

Nous habitons encore un autre monde
Peut-être l'intervale.
 
Paul Celan (recueil "De seuil en seuil" p. 71) "Et la beauté"


Et les pierres que tu as entassées,
Que tu entasses,
Vers où jettent elles les ombres et jusqu'où ?
Et le vent qui les effleure;
et le vent dérobe-t-il une ombre à ces ombres,
la met-il à tes mesures ?"

"Und die Steine, die du haüftest, die du haüst : wohin werfen sie die Schatten, und wie weit ?  Und der Wind, der drüber hinstreicht, und der Wind : rafft er dieser Shatten einen, miSt er ihn dir zu ?"
comme incitation de l'heure


Toujours Paul Celan, mais cette fois ci dans le recueil "Grille de parole" p.47

Nuit
Cailloux et galets.

Et un éclat de verre, grêle
Echange d'yeux, enfin, à contre temps :
résistant à l'image
devenu bois
la rétine
en signe d'éternité.
Pensable :
Là haut, parmi les travées du monde,
Stellaire,
le rouge de deux bouches.
Audible (avant l'aube?) :
une pierre, qui prit une autre pour cible


Trois derniers: 
"Quelle que soit la pierre que tu lèves."
 
Quelle que soit la pierre que tu lèves -
tu découvres ceux qui ont besoin de la protection des pierres
nus,ils renouvellent maintenant le tressage.
Quel que soit l'arbre que tu abats -
tu menuises le cadre du lit sur lequel les âmes de nouveau s'agglutinent
comme si, lui non plus, il ne tremblait pas,
cet éon.
Quel que soit le mot que tu dis -
tu rends grâce à perte et péril
Dans le recueil "renversé du souffle"
 
Dans les fleuves, au nord du futur,
je lance le filet que tu alourdis,
hésitant,
d'ombres écrites par des pierres
La Halde (Dans le recueil "De seuil en seuil)
 
Tu vis à côté de moi, comme moi
comme une pierre
dans la joue creuse de la nuit.
O la halde bien aimée,où nous
Roulons sans cesse,
Nous pierres,
de rigoles en rigoles,
Plus rondes à chaque fois,
Plus semblables, plus étrangères.
O cet oeil ivre
qui comme nous erre alentour,
et qui parfois, surpris,
nous voit en un.

Lu dans "La Raison", de Pascal Quignard, biographie de Porcius latron (-57, -4 AJC), Edition le promeneur, Paris, 1990, un paysage antique en quelques extraits: 

"C'est à peu près dans ce temps là qu'il souhaita s'éloigner du Viminal et des collines les plus urbaines (note de lecture :  nous  sommes ici à Rome en -24), Il trouva à se rapprocher du Tibre (...). Il ne voulu qu'une cabane de pierres plates sans mortier, avec deux pièces sans fenêtres. (...). Il mit deux ans à faire recouvrir la cahute de tuiles neuves et jaunes (...) le sol était sans pavement, il mettait des tapis de laine sur le sol pour s'asseoir."

"L.J. Gallion devint sénateur, Porcius Latron ne devint rien. Sur le bord de la rive, devant la cabane de pierres sèches, les inondations et la pluie avaient mis à nu des gros caïeux qui sortaient de terre. derrière la maison il y avait un bois d'olivier et un champ planté de froment moissonné.(...) plus loin s'étendaient la vigne et la plaine."

"Auguste citait volontiers ce mot de Porcius : ' Mon corps est un ru de boue qui n'est pas continu. Ma demeure un amas de cailloux qui tient debout par hasard. Ce que j'ai inscrits ce matin sur mon morceau de buis est moins personnel que ce que la bave lumineuse de l'escargot a noté sur sa feuille de laitue.' "


Dans "La gloire de mon père" de Marcel Pagnol :


"Cependant mon grand-père, qui n’était pas « monsieur l’aîné », n’hérita pas de la cartonnerie et il devint je ne sais pourquoi tailleur de pierre. (…) Il me parlait souvent de son métier ou plutôt de son art, car il était maître appareilleur".

Il n’estimait pas beaucoup les maçons : « Nous disait il, nous montons des murs en pierre appareillées, c'est-à-dire qui s’emboîtent exactement les unes dans les autres, par des tenons et des mortaises, des embrèvements, des queues d’arondes, des traits de Jupiter… bien sur nous coulions aussi du plomb dans les rainures, pour empêcher le glissement. Mais c’était incrusté entre deux blocs, et ça ne se voyait pas ! Tandis que les maçons ils prennent les pierres comme elle viennent, et ils bouchent les trous avec des paquets de mortier … Un maçon c’est un noyeur de pierres, et il les cache parce qu’il n’a pas su les tailler. »

Plus loin lorsque le petit Marcel s’est perdu en voulant suivre son père à la chasse… « Je découvris une sorte de hutte conique, faite de pierres plates, et très ingénieusement disposées. Chaque rang circulaire avançait vers le centre, de la largeur d’un doigt, si bien qu’au sommet, les cercles diminués à chaque étage, finissaient par se rejoindre. Le dernier laissait un vide grand comme un assiette, qui était couvert d’une belle pierre plate. La vue de ce refuge me rappela ma triste situation. (…) Je n’y entrais pas tout de suite (…)A travers le trou qui servait d’entrée, je plongeais un rameau de pin, que j’agitai dans tous les sens, en proférant quelques menaces. Le silence me répondit. Avisant une meurtrière, j’examinais l’intérieur. Il n’y avait rien si ce n’est une couche d’herbes sèches, sur laquelle un chasseur avait du dormir. Je me glissai dans la hutte que je trouvai fraîche et sûre, là du moins je pourrai passer la nuit à l’abris des fauves nocturnes mais je constatais avec inquiétude que le trou d’entrée n’avait pas de porte !… J’eus aussitôt l’idée de réunir un bon nombre de pierres plates et de le boucher par un petit mur (…).Première déconvenue, il n’y avait pas une seule pierre plate autour de la hutte. Où donc le berger avait il trouvé celles qui lui avaient servi ? Je compris dans un éclair de génie qu’ils les avaient prise là où il n’en restait plus. Je n’avais qu’à chercher plus loin, ce que je fis avec succès… Pendant que je transportais ces matériaux –qui m’écorchaient les mains- je pensais : « pour le moment personne n’a d’inquiétude. Mais quand ils (les chasseurs, le père et l’oncle de l’enfant Marcel) vont rentrer quelle catastrophe. Maman va peut être s’évanouir ! En tout cas elle va pleurer. Sur quoi je me mis à pleurer moi-même, tout en serrant sur mon ventre écrasé une pierre parfaitement plate, mais qui pesait autant que moi. »


La BD de Baudoin, "Couma aco", éditée par "l'association" parle d'un grand père murailleur... 

Toute l'émotion que l'on éprouve à construire un mur en pierre sèche est résumée en quelques dessins.

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"Est-ce le mur qui tient l'arbre ou le contraire?
et les racines, jusqu'où vont-elles?
je ne sais pas. Des hommes ont habité là. Quand je frappe avec ma serpe sur les ronces qui effacent les chemins, je sens ces hommes dans mes bras."

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" Là couma aco es béu!"

Dans "Le Fleuve Alphée", de Roger Caillois aux éditions Gallimard, 1978

"Elargissant sans cesse le cercle d'une solidarité qui me diluait au plus lointain de moi même, j'en vins à rencontrer dans les pierres la récompense souhaitée. Elles se révélèrent peu à peu comme un album gigantesque. Situées à l'extrême de la taciturnité, elles étaient placées du même coup aux antipodes de l'homme et de la pensée. Je les devinais contenir en leur masse impassible et perdurable la totalité des transformations possibles de la matière, sans rien en exclure, ni même la sensibilité, l'intelligence, l'immagination."

"Subsistent les pierres qui sont un monde à elles seules; peut-être qui sont le monde, dont tout le reste, l'homme le premier, sommes excroissances sans durée."
 
"Dans le même temps je cherche à donner à mes phrases, même transparence, même dureté, si possible, -pourquoi pas?- même éclat que les pierres. (...) Les pieres, présentes à l'origine des choses, se confondent avec les choses mêmes. Et rien d'humain qui ne leur soit irrémédiablement étranger. Elles subsisteront dans l'espace sidéral après l'universelle et l'inévitable dissolution. Les vestiges d'un parasite d'un jour ne seront plus que trace dans l'épaisseur des pierres. Fossile pour personne.
Je laisse les images m'assaillir, prolonger la pierre, (...). Je n'attends pas d'accéder à quelque révélation. C'est une simple pierre que j'ai toujours sous les yeux. Qui ne me dévoile pas le moindre secret.(...) Je ressent un calme bonheur. Je me trouve récompensé, (...). Je reçois la confirmation d'un savoir que je ne savais pas m'appartenir."


Dans "Respirer l'Ombre" de Giuseppe Penone, aux éditions E.N.S.B.A, 1999-2004

"La pierre attend les mouvements végétaux. Elle est comme un fragment de mer. Elle a la même valeur visuelle que l'eau qui inclue les récifs et lèche la côte mais, contrairement à la mer, c'est elle qui est peu à peu enveloppée par l'expansion lente et fluide du végétal"

"La capacité qu'ont les pierres de se soulever du sol ressemble à celle des albatros qui, grâce à l'envergure de leurs ailes, exploitent les courants ascendants de l'air,"

"Une pierre qui se lève de terre sous l'effet de la pluie, de la rosée. Une pierre qui vit les variations de l'humidité du milieu où elle se trouve est une sculpture en plein air. La corde végétale qui attache la pierre, rétrécit avec la pluie et la soulève."


Trouvé par un ami dans le "Journal de bord" de Pierre Guyotat, qui résume en quelques mots le conte de "Jean des pierres".
(Ce conte d'origine bretonne, raconté par Pierre Jakez-Hélias "Les autres et les miens" a récemment été repris par J.Y. Royer dans une version "murailleur provençal" et chanté par Renat Sette, et également joué par Roger Pasturel.

"Un soir de tempête, il était couché avec sa femme, mais il ne pouvait dormir. Il se retournait sans cesse dans son lit. Tout à coup, à sa femme: "Il faut que j'y aille, j'entend une pierre qui souffre, elle m'appelle!". Le lendemain matin on l'a retrouvé mort. Le mur s'était écroulé autour de lui, mais aucune pierres ne l'avait touché dans sa chûte. Il serait sur son coeur la pierre qui souffrait."


Un autre conte, mettant en scène lui aussi le carractère d'un murailleur. Il s'agit de "La Grande muraille", de Claude Michelet édité en 1981 aux éditions Robert Laffont. Firmin y hérite d'une parcelle de pierre, il passe sa vie à en faire un jardin, clos d'une monumentale muraille maçonnée à sec.

"Je suis le riche propriétaire d'une pièce que personne n'a jamais pu cultiver et que personne ne cultivera jamais car les cailloux cachent la terre"
"Les hommes s'étaient servis du lieu pour se débarrasser des innombrables pierres ramassées dans les champs. A la base des tas c'était les gros moellons, ceux qu'on enlève lorsqu'on décide de défricher une pièce. Et puis peu à peu par étage le volume des quartiers diminuaient. Les tas étaient couverts de petites caillasses grosses comme le poing que des générations de femmes et d'enfants avaient glannées derrière les herses."
"Une belle muraille, pas avec des pierres en vrac mais avec des pierres que je rangerai et chacune aura la place qu'elle devra avoir"
"Un quartier monstrueux, d'au moins quatre quintaux l'occupa pendant plusieurs jours car il voulait coûte que coûte que ce rocher prenne place dans les fondations"
"La muraille atteignit un mètre ciquante de haut. A sa base une large bande de terre rouge, mis au jour par l'enlèvement des pierres se fendilla sous le soleil."
"Et la muraille s'éleva, belle, majestueuse. Elle s'étira peu à peu comme un long reptile blance. Derrière sa tête monstrueuse, couverte d'un jardin fleuri,elle déroula son corps en une courbe douce qui épousa la forme du champ."


Gérard de Nerval "vers dorés"

"Un pur esprit s'accroît sous l'écorce des pierres"


Une saison en enfer, Arthur Rimbaud

"Si j’ai du goût, ce n’est guère
Que pour la terre et les pierres.
Je déjeune toujours d’air,
De roc, de charbons, de fer.
 
Mes faims, tournez.
Paissez, faims, Le pré des sons.
Attirez le gai venin
Des liserons.
 
Mangez les cailloux qu’on brise,
Les vieilles pierres d’églises ;
Les galets des vieux déluges,
Pains semés dans les vallées grises "


Un texte de André Frénaud

"Plainte du dernier restanquère

Dans la Provence et les montagnes
Allant de commune à commune
Avec mes mains pour seuls outils
j'élève et je maintiens les murs.
Le sol en pente, je l'arc-boute
Pour l'établir en terre ouvrable.
Cet art si beau qu'on m'a transmis
C'est l'architecte de la terre
Je suis compagnon Retanquère.
J'étais car tout ça c'est perdu. "


"Qu'est-ce donc qu'être quand on ne sait pas ce que l'on est ?
- Être, comme la pierre. Un lieu, rien d'autre."

Fernando Pessoa


"Tout change, quoique pierre"

Monet


"Je voudrais visiter les nuages et saluer les pierres"

Yuan Hongdao
In ' Nuages et pierres' édition Picquier poche


Dans apprendre à parler à une pierre d’Annie Dillard, éditions Christian Bourgeois

« Il y a un homme la trentaine qui habite seul avec une pierre à laquelle il essaie d’apprendre à parler (…) c’est un galet de plage, ovale, grand comme la paume, dont le gris sombre est strié par une bande de blanc qui court tout autour (…) une de ces pierres que nous appelons pierre à souhaits, pour des raisons obscures mais pas inimaginables, je crois. »

 

« Il la garde sur une étagère. D’habitude, la pierre est protégée par un carré de cuir brut, tel un canari endormi sous sa couverture. Larry ôte la couverture pour les leçons de la pierre (…). »

 

« Nous sommes ici pour être témoin. Nous ne pouvons rien faire d’autre avec ces matériaux muets dont nous n’avons pas l’usage. D’ici à ce que Larry apprenne à parler à sa pierre, d’ici à ce que dieu change d’avis ». « Nous pouvons mettre en scène notre propre action sur la planète – construire nos villes sur les plaines, construire des barrages sur les rivières, ensemencer ses terres fertiles –mais notre activité signifiante couvre bien peu de terrain. »

 

« Le silence est tout ce qu’il y a, l’alpha et l’oméga. Dieu planant sur les eaux, les notes mêlées de dix mille choses, la plainte des ailes (…) » 



Une pierre sur l’autre 

Passent et repassent 

Le jeu des perspectives 

Le choix des volumes et des formes

  

Perdu dans le détail 

A faire tenir debout le hasard 

L’attention en grand écart à l’horizon 

Sur le fil tendu de la tâche

  

Au centre ‘le beau’ 

La matière que j’agis 

Et qui me laissera passer,

 

Immobile,

 

Nourrie de mes gestes 

Tels qu’ils l’ont laissée

 

Là 

Où je ne puis rester.

 

L. Cagin, les chansons du murailleur


La grotte aux lotus

« Les pierres de la grotte sont belles à croire qu’elles sont vivantes, encore plus parfaites que si elles avaient été sculptées.

J’aime a le répéter, les collines des environs ont une ossature de pierre sous un épiderme de terre, elles sont creuses à l’intérieur et ouvertes de tous côtés et leur relief s’est enhardi au fur et à mesure que l’on en a extrait des pierres.

(…) Si la montagne laissait mieux voir son ossature, quelle ne serait pas sa merveilleuse beauté ? »

Yuan Hongdao
In ' Nuages et pierres' édition Picquier poche
 


Trouvé dans "Jean le Bleu" de Jean Giono, edition Grasset 1932

"Les allées étaient pavées de petits cailloux plantés de champ. Soeur Dorhotée était la paveuse. On la trouvait toujours, et toujours tout à coup, accroupie dans une bulle d'ombre. Elle alignait ses petites pierres en des arcs de cercle dont la largeur du chemin ne laissait apercevoir qu'un segment: le segment visible et paisible abrité par le couvent. Le reste du cercle s'en allait en fumée dans le jardin, dans le monde là bas, loin, loin, au delà des murs et des collines qu'on apercevait un peu, et dieu seul sait par où il s'en allait tourner avant de revenir dans les mains de soeur Dorothée."

 



Avec leurs mains sur leur tête
ils avaient monté des murettes
jusqu'au sommet de la colline

Jean Ferrat



Pierre à pierre, le silence

Une saison de gel
sauvera nos derniers mots

Jean-Claude Izzo, L'aride des jours, editions Librio 2001


"Si tu me dresses un autel de pierre, ne le bâtis pas de pierres taillées, car à les tailler au burin, tu les profanerais".

Exode (20, 25)



"C'était, là-bas, dans l'ouest de la Cornouailles, une matinée blanche, immobile, au milieu de l'aspect primitif de la lande et des énormes blocs de granit qui faisaient saillie hors de terre. On comprend et facilement que les hommes adorent la pierre. Ce n'est pas la pierre. C'est le mystère de la terre, puissante et préhumaine qui montre sa force".

D.H. Lawrence, Kangourou, editions Gallimard


"Devant la montagne un rocher est constitué d'innombrables fragments de pierres, aérolithes créés par le vent, quartz créés par la terre, pierres ponces créées par la mer, cendres crées par le feu, fragments ressoudés au long d'une succession d'âges si infinie que la pensée ne peut le concevoir"

Liu Tong, in "les paradis naturels", Jardins chinois en prose, éditions Picquier poche


"Se glisser dans la texture des pierres
Pénétrer la trame des murailles"

Andrée Chedid, recueil "Au coeur du coeur"

 


Le site de Pierre d'Iris propose une sélection de textes écrits à partir d'une inspiration liée à la pierre sèche.

 



Vous êtes passés par ici, n'hésitez à faire vivre cet article en indiquant des textes qui pourraient y être inséré, merci d'avance de laisser un commentaire pour me les indiquer.

 

 Mis à jour le 10 janvier 2016

6 octobre 2005

Pierre à pierre et pas à pas

Par cette suite de photos, prises lors du chantier du mur de soutènement dans le Luberon, j'espère vous faire partager un peu de technique :

 

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Notez que les parpaings ne sont là que provisoirement. Ils ont été installés lors de l'apport de terre afin d'éviter que celle-ci ne glisse avant la construction du mur.

 

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25 juillet 2009

La pierre et le bois

Le bois a été très employé dans l’aménagement en pierre sèche.
Il n’en reste aujourd’hui plus de trace dans les constructions, celui-ci ayant généralement pourri.

En analysant la structure d’un parement, il est encore possible à un œil averti de supposer, qu’une poutre ou un gros bâton a pu être planté dans le mur.

Les usages pouvaient être multiples, petits abris ou cabanes, piquets de séchage, point d’attache pour les bêtes ou pour une treille, escaliers, etc.

 

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                                             Ici l’exemple d’un vieil escalier volant en bois à Colmars-les-Alpes

La technique pour réaliser ces aménagements est très simple, elle a été décrite dans l’article sur léchafaudage volant, visitez également cet article sur les escaliers volants.

 

Voici ici un exemple d’installation d’un escalier volant en bois

 

Munissez-vous de planches ou de bâtons suffisamment solides pour recevoir le poids d’une personne, et suffisamment longs pour être plantés sur les deux tiers de leur longueur dans le mur

 

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Faites attention de ne pas mettre la dernière marche trop près du couronnement du mur cela pourrait le soulever, abimer le mur et rendre votre escalier dangereux.

 

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Positionnez les marches afin d’obtenir le confort d’utilisation de l’escalier

Plantez les en force dans la structure du mur à l’aide d’une masse en guidant leur pénétration pour qu’elles ne dévient pas.

 

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L’escalier fini

 

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7 mars 2008

Arbres et murs

Ensemble, arbres et murs, nous offrent des paysages de carte postale.

 

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Pourtant ils ne font pas toujours bon ménage, et il n’y a pas de moyen plus radical de ruiner une maçonnerie que d’y laisser pousser des arbres. C’est pourquoi lors de l’entretien régulier de vos maçonneries en pierre sèche vous arracherez tous les jeunes plants d’arbuste poussant à proximité afin que leurs racines ne s’y implantent pas.

 

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Les racines de cet arbre ont éboulé le mur

Cependant toute règle à ses exceptions, et un équilibre peut être obtenu entre une maçonnerie en pierre sèche et un arbre.

 

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Cet amandier pousse dans une maçonnerie clavée, il la renforce en augmentant la poussée latérales sur les pierres et participe à la solidité du mur.

 

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Ce chêne a fait tomber le mur ! Ne soyez pas rancuniers, installez un arc de décharge qui permet de garder les deux.

 

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Chêne incognito dans un mur en pierre sèche.

 

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Plutôt que de déplacer une vigne, aménagez le mur...

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Le mur a disparu, il n'en reste que ce petit bout, en suspend, soutenu par la racine d'un arbre voisin.

 

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Celui qui a construit ce mur de soutènement l'a volontairement fondé sur les racines des arbres.

Pour finir, les murs en pierre sèche sont des structures adaptatives et souples, les arbres ne leur sont pas obligatoirement délétères, ils s'adaptent.

Si vous avez décidé de planter des arbres, visitez le site de l'association APA,
ses conseils vous enrichiront !

11 février 2010

Le drainage d'un mur en pierre sèche

Construire un mur de soutènement est avant tout un aménagement paysagé. Il s’agit de réorganiser le sol en fonction de la pente dans le but de créer une surface plane sur laquelle une culture ou un jardin pourront être implantés.

La réorganisation concerne toutes les composantes du sol, ainsi que son profil, pente et relief. La pierre et les cailloutis en sont extraits et mis de côtés, ce seront les matériaux utilisés pour la construction du mur proprement dit. Par ce tri, la terre est bonifiée, le mur n’est là que pour la retenir.

La plupart des gens regardent les murs de soutènement en pierre sèche comme des ouvrages de maçonnerie, or ils sont bien plus que cela. Ils ne sont qu’un des éléments d’un aménagement beaucoup plus vaste et qui engage tout l’environnement dans lequel ils s’inscrivent*.  

Le mur ne retient pas seulement la poussée de la terre, il évite son érosion, il permet une meilleure absorption de l’eau par les sols, réduisant ainsi substantiellement la quantité d’eau de ruissellement, et pour finir il assure le drainage du terrain. Il est l’un des éléments de la gestion d’un facteur primordial pour le terrain et sa mise en culture, l’eau.

En fait, et sans beaucoup forcer le trait, l’aménagement d’un terrain par des ouvrages en pierre sèche a une seule obsession, la gestion de l’eau, son écoulement, sa diffusion, sa récupération et cela concerne en particulier les eaux pluviales.
(je vous conseille, pour en prendre la mesure de visioner la vidéo qui est proposée sur cette page du blogue Lesperdigones ici).

Tous les ouvrages en pierre sèche sont naturellement drainants, ils récoltent l’eau et la redistribuent. Drainer un écoulement d’eau ne le fait pas disparaître (même si il le réduit en arrosant les parties traversées), il dirige le surplus là où le drain s’arrête.

Un positionnement judicieux des ouvrages en pierre sèche sur un terrain permet de créer une circulation de l’eau selon un réseau que l’on aura au préalable bien réfléchi.

Chaque mur récolte le ruissellement de surface au niveau de ses fondations, la fondation elle-même draine l’eau qui s’écoule jusqu’à son point bas. Arrivée à ce niveau, si il n’a pas été prévu de poursuite du drain, elle stagne et fait une flaque. Selon la quantité d’eau (par exemple lors de pluie abondantes ou orageuses), cette flaque et son écoulement dans la pente peut devenir problématique. Elle peut être source d’érosion du terrain, de sape des fondations, d’éboulement des murs, et plus en aval d’inondation.

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Exemple de mur dont le point bas des fondations n’a pas été poursuivi par un drain, ici après une forte pluie, l’eau s’est accumulée et a commencé à emporter la terre en ruisselant

 

C’est pourquoi chaque point bas des fondations d’un mur de soutènement en pierre sèche doit être aménagé d’un exutoire qui permet au flux de l’eau de poursuivre sa route sans dommage pour l’aménagement.

 

Cet exutoire sera lui-même poursuivi par un drain dont la fonction est de diriger l’écoulement du surplus d’eau là où il ne risque pas de créer de dommages.

 

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Tous les drains se recoupent ainsi et créent un réseau qui finit par déboucher dans un fond de vallon ou un ouvrage où l’eau pourra reprendre sa pente « sauvage ».

Traditionnellement le cours de ces drains passait par des bassins et des citernes (aussi appelées aiguiers en Provence), où l’eau était récoltée et conservée pour l’arrosage lors des périodes sèches. Ces citernes faisaient partie du réseau de circulation des eaux pluviales avant leur arrivée dans le fond de vallon. Cette pratique optimisait l’utilisation des eaux de pluie, tout en tenant compte techniquement des dégâts qu’elles pouvaient produire.

Un exemple sur ce mur

Le mur fait plus de 30 mètres de long, la préparation des fondations creusées dans le sol crée une tranchée en pente dans laquelle l’eau va s’écouler.

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Les fondations du mur en pierre sèche, protégées par un géotextile qui empêchera la terre de s’infiltrer et de combler la tranchée, vont servir de drain géant où va s’écouler tout le surplus d’eau lors des précipitations

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Toute cette eau va se regrouper au point bas du mur

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Tant que le drainage n’est pas poursuivi, l’eau va se retrouver piégée là et va s’écouler sur le terrain lui-même  c’est pourquoi le drain des fondations est poursuivi par un drain enterré qui permettra de diriger l’eau soit vers un ouvrage permettant son stockage, soit dans un écoulement aménagé où elle ne pourra pas entrainer de dégradations.

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Ici une ancienne citerne récoltera le surplus d’eau et la stockera 


Le mur fini, le drain d’évacuation n’est plus visible. Ce travail est facilement oublié car peu spectaculaire, il est néanmoins vital pour la longévité de votre ouvrage et pour le respect des sols sous-jacents à celui-ci.

D'autres articles traitent du drainage sur ce blog.

Lire également le compte rendu de visite d'un spéléologue dans un puits en pierre sèche.



* C'est d'ailleurs pourquoi le murailleur, aménageur pierre sèche, n'est pas un maçon, la maçonnerie du mur n'est qu'une partie de son travail, sa principale compétence réside dans l'analyse de l'aménagement, dans la gestion des sols, du terrain, et de l'écoulement des eaux.

Mis à jour le 31 aout 2011

25 mars 2006

C'est le printemps

... et un petit article à la volée, une tranche de vie autour d'un petit bout de mur, en pierre sèche bien sûr !

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Ci dessus le mur en question, nous sommes en fin mars, dans le département du Var, presque limitrophe des Alpes-Maritimes.

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le même mur en début avril, les travaux avancent, les fleurs fleurissent...

 

Les plantes

 

 

Les plantes qui poussent dans les murs sont dites "rudérales".

 

Voici celles qui poussent dans ce mur :

 

La Doradille

 

En latin, "Ceterach officinarum", famille des "Aspleniaceae", aussi appelée "herbe dorée"

 

Il s'agit d'une plante officinale. Pierre Lieutaghi, dans le "Livre des bonnes herbes" (Actes Sud, 1996, p.244), la cite comme diurétique.

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 Ci-dessus on voit comment les racines s'inscrivent à plat dans l'interstice laissé entre les pierres.

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Début avril. Les pluies sont passées depuis un moment, les feuilles s'enroulent, la plante se dessèche et se prépare à traverser l'été.

Le Nombril de Vénus

Il s'agit ici de "l'Umbilicus horizontalis", de la famille des "Crassulaceae", une autre variété est dite "rupestris".

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presque en fleur, grâce aux dernières pluies...

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profitant du moindre trou dans la pierre.

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Ci dessus une partie du mur colonisée par les nombrils de Vénus. Nous sommes maintenant en fin avril.

L'Asperge sauvage

Il s'agit ici de "l'Asparagus acutifolius", de la famille des "Liliaceae".

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je ne vous dis qu'une chose ... elle était très bonne!

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Les racines des asperges sont profondes et charnues, elles stoquent l'eau. Le nombril de vénus, quant à lui, n'a presque pas de racines, il stoque l'eau dans ses parties aériennes. C'est cette adaptation qui lui permet d'être aussi présent dans les murs.

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La Capillaire

(Je ne peux pas vous en donner le nom latin car je n'ai pu la reconnaître de façon sûre, peut-être une personne qui passera par là pourra nous éclairer plus précisément sur cette plante. Il ne semble pas s'agir de "l'Adiantum capillus-veneris", dite capillaire de Montpellier car les pétioles ne sont pas noirs).

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Ces plantes arrivent à cohabiter, ici avec la doradille et le nombril de Vénus :

capillaire, doradille et nombril

La Garance

Il s'agit ici de "Rubia peregrina", de la famille des "Rubiaceae".

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Ce que je nommais "l'Herbe à Robert"

Merci ma tante, bien connue des élèves de sciences nat. d'Alsace et de Bretagne, pour la précision, tous les géraniums sauvages ne sont pas des "herbes à robert" et celui ci semble être un géranium rotondifolium.

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Plante très courante et qui pousse à cet endroit du mur car de la terre s'y est déposée.

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nous voici en avril et elle a fleuri.

 

Ce que je nomme " Séneçon", mais lequel ?

(merci encore de votre aide)

 

 

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La Valériane

Il s'agit ici de la "Centranthus ruber", de la famille des "Valerianaceae".

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ici en mars.

 

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début avril, en fleur.

 

La Vigne blanche

 

Il s'agit ici de la "Clematis vitalba", de la famille des "Ranunculaceae".

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C'est une clématite, très envahissante, si on la laisse pousser elle forme des lianes qui, soit grimpent aux arbres, soit s'étalent et etouffent toute autre végétation.

 

Une Euphorbe

Il s'agit ici de l' "Euphorbia helioscopa", de la famille des "Euphorbiacée", elle est aussi appelée l'Euphorbe réveil matin !

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Ci dessus, nous sommes en fin avril, l'alumette vous donne la taille de cette euphorbe, nanifiée pour s'adapter, survivre et fleurir sur cette petite motte de terre.

Le Fumeterre

Il s'agit ici du "Fumaria officinalis", de la famille des "Fumariacées", elle est aussi appelée Fiel de terre !

Il s'agit d'une plante officinale.

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En fleur. Début avril.

Le Lierre

Il s'agit ici du "Hedera helix", de la famille des "Haraliacées"

Il s'agit d'une plante officinale. Pierre Lieutaghi, dans "Le livre des arbres, arbustes et arbrisseaux" (Actes Sud, 2004, p.784) la note comme dépurative et sédative en usage interne (attention il convient de bien se renseigner avant d'en avaler, il s'agit d'une plante TOXIQUE). En usage externe, résolutif, détersif, cicatrisant.

C'est également une plante saponifère.

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Ici une jeune pousse où des fourmis ont mis quelques pucerons à pâturer.

 

La Mercuriale

Il s'agit ici de la "Mercurialis annua", de la famille des "Euphorbiacées"

Il s'agit d'une plante officinale, elle aussi TOXIQUE.

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elle n'est pas ici tout à fait dans son élément, elle préfère s'épanouir dans une bonne terre arrosée de jardin.

 

Ce que j'appelle "l'Orpin"

Il s'agit ici du "Sedum spathulifolium 'cappa blanca' "

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Le Sedum

Il s'agit ici de "Sedum sediforme" dit aussi "Sedum nicaeence", de la famille des "Crassulasseae".

 

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il est ici associé sur la même pierre avec les grands absents de mon article, car je ne peux pas vous en donner, non seulement le nom en latin, mais aussi en français :

Les Lychens et les Mousses

 

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Nous sommes maintenant en fin avril...

Deux nouvelles plantes s'imposent dans cet article par une belle floraison.

L'Iris

 

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C'est l'une des plantes les mieux adaptées pour le haut d'un mur en pierre sèche.

Elle peut aussi être considérée comme une plante technique. En effet ses tubercules et ses racines retiennent la terre des talus et remplacent aventageusement le géotextile du haut du mur.

Une Saponaire

Il s'agit ici soit de la " Saponaria Calabrica" soit de la "Saponaria ocymoides", de la famille des "Caryophyllaceae". Mes flores et mes connaissances botaniques ne me permettent pas d'aller plus loin dans la reconnaissance.

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Tout début mai, sur le mur exposé au sud, c'est déjà l'été, une dernière fleur

L'aillé fer

Il s'agit ici de l' "allium roseum" de la famille des "liliacae".

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  Mis à jour le 8 mai 2006.

28 avril 2011

La pierre sèche à Taulignan

La technique de la pierre sèche se retrouve sur tous les continents. Elle est principalement utilisée pour la gestion des sols et elle structure les zones d’activités pastorales et agricoles. Sont construits en pierre sèche des soutènements de terrains pentus (toujours accompagnés d’escaliers et de rampes d’accès entre les différents  niveaux), tous les ouvrages de drainage des sols (drains, touvières…) et de stockage de l’eau (aiguiers, puits…), des murs de clôture (en zone pastorale ou pour protéger les zones de culture), des chaussées et des chemins (calade).

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Mur en pierre sèche au premier plan et rempart de Taulignan en fond

La pierre sèche a aussi été utilisée pour d’autres ouvrages adaptés aux activités humaines tels des apiers*, des aires de battage, des zones de sèchage des fruits, et du petit bâti pour abriter les bêtes (poulaillers, bergeries, enclos…) ou servir de remise ou de cabane (par exemple les bories).

L’utilisation de cette technique débute au néolithique avec l’invention de l’agriculture. Le travail de la terre exhume alors les pierres du sol. Cette nouvelle ressource encombrante trouve son utilité dans l’aménagement des sols pour optimiser la production agricole et pour construire l’habitat. Avec la nécessité de l’épierrement des cultures commence donc le travail de fourmi des générations successives et qui débouche aujourd’hui sur l’aménagement des terroirs actuels. La maçonnerie à pierre sèche a alors la particularité d’être mise en œuvre par tout le monde et, même si certains en font une spécialité professionnelle**, tout un chacun en connaît les principes et les applique pour son propre lopin de terre.

 

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Dalles dressées de clôture

Le terroir de Taulignan en plus de tous ces ouvrages possède la particularité d’avoir été la zone d’extraction d’une pierre calcaire de grande qualité. Ont alors été extraites des dalles de pierre qui bordent encore aujourd’hui les chemins, séparent les parcelles, traversent les ruisseaux ou les canaux, dirigent les eaux dans les touvières.

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Mur en pierre sèche avec couronnement en pierre clavées

Construire à pierre sèche consiste à maçonner en utilisant seulement de la pierre sans aucun apport de liant quel qu’il soit. Pour que l’ouvrage tienne, tout le travail consiste à jouer sur l’équilibre des pierres. Le poids des pierres est au final l’unique liant qui permet à l’ouvrage de tenir. On dit que l’on à faire à des murs poids et le principe de base est de créer un ouvrage se comportant comme un monolithe.

Si le principe en est très simple, la mise en œuvre n’est pas toujours aisée à réaliser.

Pour résumer on peut dire que pour réussir une bonne maçonnerie en pierre sèche il faut respecter méticuleusement 5 règles lors de la pose de chaque pierre :

L’assise qui permet à chaque pierre d’appuyer de façon stable sur les pierres du rang inférieur.

Le croisement qui assure la répartition du poids et des forces qui lient les pierres les unes autres.

Le blocage qui cale les pierres entres elles sur leurs faces de joint et d’assise pour éviter qu’elles puissent glisser ou bouger dans la maçonnerie.

Le fruit qui donne à l’assise de chaque pierre une inclinaison par rapport à l’horizontale. Cette inclinaison a pour but de diriger la force exercée par le poids du mur vers l’intérieur, augmentant ainsi sa stabilité.

Le parement. Si cette cinquième règle ne participe pas de la solidité du mur elle reste néanmoins primordiale car elle donne l’aspect final soigné et esthétique du mur.

Chaque ouvrage a également des particularités techniques induite par son utilité finale, ainsi les murs de soutènement sont toujours doublés côtés talus d’un drain composé de cailloutis qui réduit la poussée des sols, retarde l’infiltration des particules de terre et permet un drainage optimum, Les murs de clôture ont la particularité d’avoir deux faces de parement, les bories développent  la technique dite de l’encorbellement pour créer une toiture ...

Tout en respectant ces cinq règles il est possible de construire en pierre sèche de manières très différentes. Le terroir de Taulignan permet d’en voir quelques exemples très emblématiques :

Les murs d’épierrement et les clapiers. Les pierres brutes sont empilées en murs et en pierriers au fur et à mesure de leur extraction de terre lors des labours. Le but de ces constructions est uniquement de libérer de l’espace de culture au moindre effort et le plus rapidement possible. La maçonnerie qui naît de ces empilements est brute et permet de stocker la pierre sur la plus petite surface possible dans l’attente d’un usage ultérieur.

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Pierrier

La maçonnerie croisée. Il s’agit de maçonner les pierres brutes dans leur lit, à plat afin que le poids s’exerce verticalement et se répartisse de haut en bas de la structure du mur créant ainsi une structure monolithe comme tissée pierre par pierre.

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Croquis d'un mur en maçonnerie croisée

 

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Photo d'un mur en maçonnerie croisée

La maçonnerie clavée. Les pierres brutes sont alors posées en délit, la force verticale du poids est alors dirigée latéralement sur les pierres voisines. La structure ainsi maçonnée est beaucoup plus solide et résiste mieux aux poussées latérales qui s’exercent sur le mur. Cette technique est assez courante à Taulignan, souvent associée à la plantation d’arbres qui en grandissant accentuent la poussée latérale des pierres les unes sur les autres, ce qui a pour effet de renforcer la solidité du mur.

C’est également une technique utilisée pour le couronnement des murs lorsque l’on ne dispose pas de pierres suffisamment lourdes pour le lester.

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Croquis de mur en maçonnerie clavée

 

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Photo de mur en maçonnerie clavée

La maçonnerie à joints vifs. Toutes les pierres sont taillées et reprises pour être ajustées de façon idéale. Il s’agit d’une maçonnerie savante que certains spécialistes ne considèrent pas comme de la pierre sèche tellement sa mise en œuvre demande du temps et du savoir faire. Il s’agit souvent d’une maçonnerie mise en œuvre par les ponts et chaussées au XIXè et début XXè pour soutenir les talus de bords de route.

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Mur en maçonnerie clavée

*Un apier est un rucher

**ils sont appelés murailleurs en Provence depuis le XVIIè

Article publié dans le journal de l'Association des 11 tours, Taulignan (Drôme).

 

13 mai 2009

La boutisse traversante d'ancrage au talus

Tout est bon pour renforcer un mur de soutènement et augmenter sa durée de vie.

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Le bloc de "boutisse traversante d'ancrage au talus" vue de face

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Le même bloc dans la coupe du mur

À l’occasion de la restauration d'un mur à Ganagobie, j’ai pu observer l’efficacité de la "boutisse traversante d’ancrage au talus", cette pierre traverse non seulement la maçonnerie du mur, mais également l’épaisseur du drain et se plante ensuite en profondeur dans le sol lui-même.

 

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La boutisse traversante d'ancrage au talus a stoppé l'éboulement

Celle-ci mesure presque deux mètres de profondeur pour un parement posé en losange dont les côtés mesurent 50cm.

Lors de l’effondrement du mur, suite à l’hiver très pluvieux que nous venons de connaître survenu après une longue période de sècheresse, elle a stoppé la brèche et a ainsi permis à une grande partie du mur de rester debout sans être entrainé dans la chute.

Le principe de la "boutisse traversante d’ancrage au talus" est très simple, la pierre est utilisée comme un clou qui traverse la structure du mur en pierre sèche et l’arrime au sol qu’il retient. Par son inertie, son poids, sa profondeur, l’équilibre qui lui est donné, le bloc est quasi autoporteur, il ne pèse pas de tout son poids sur le mur puisqu’une grande partie de la masse repose dans le sol que le mur soutient. Ceci évite l’écrasement de la structure maçonnée, en effet ce bloc mesure presque 0.5 mètre cube, il ne doit pas peser loin de la tonne.

 

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La boutisse d’encrage n’est pas placée au hasard dans la hauteur du mur, elle s’installe là où la poussée du sol est optimale, c'est-à-dire entre le premier et le deuxième tiers de sa hauteur, à l’endroit où se créent les "ventres" lorsque le mur, infiltré par les particules de terre, est poussé par les variations de volume du sol.

De telles boutisses ne sont installées que pour des murs dépassant les 1m80 de haut, la mise en œuvre de leur installation n’est pas évidente et nécessite un travail de force en minutie. On imagine le travail qu’a demandé la pose d’une telle pierre à l’époque, il sera aujourd’hui facilité par les engins mécaniques modernes.

 

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Une autre solution d'ancrage

D’autres solutions existent pour ancrer le mur au sol lorsque l’on n’a pas sous la main des blocs d’une telle grosseur. Des boutisses d’ancrage demi-traversantes sont installées à mi-mur dans l’épaisseur de la maçonnerie et traversent ensuite le drain pour arriver au sol.

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Le bloc de "boutisse traversante d'ancrage au talus" lors des travaux préparatifs à la restauration

 

12 mai 2009

L'échafaudage volant

Travailler au dessus d’une certaine hauteur ne nécessite pas de gros moyens lors de la construction de murs en pierre sèche. Lors de la construction des bâtiments au moyen âge, il était habituel de prévoir des trous de boulin régulièrement aménagés dans le parement des murs et destinés à recevoir la structure d’un échafaudage. La même technique est utilisée en pierre sèche.

Les joints entre les pierres n’étant pas comblés par du liant, il est relativement facile d’y planter des barres de fer sur lesquelles pourra reposer une planche. Cette planche sur laquelle le maçon pourra monter lui permettra d’atteindre le haut du mur et d’y travailler.

 

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Placer la barre de fer dans le joint des pierres

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Enfoncer les barres dans le mur

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Y poser un plateau

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Merci à Florian pour la figuration !

2 août 2005

Aménagement d'une place de parking à Marseille

Etat des lieux avant travaux

Il s’agit d’une villa avec jardin.

La rue par laquelle on y accède est à voie unique et l’on ne peut s’y garer.

Le terrain sur lequel la maison est construite est en pente.

Tout cela fait qu’il n’est possible de garer sur le plat aménagé par un mur en pierre qu’une petite voiture… et celle-ci dépasse encore un peu sur la voie.

Cela a pour effet secondaire de générer un coup de klaxon systématique de la part de tout véhicule qui emprunte la rue.

Par ailleurs le jardin demande des aménagements et l’évacuation de gravats et déchets. Une petite remise y menace ruine.

 

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Une solution économique et écologique 

La demande du propriétaire est d’étendre l’aire de stationnement afin de pouvoir rentrer une voiture et d’évacuer les gravats.

La solution que je propose de mettre en œuvre est :

- Démolir le mur existant sur 4 m et en récupérer les pierres.

- Faire une extension de l’à-plat sur une profondeur suffisante pour se garer.

- Se servir des pierres pour le parement du mur de soutènement à construire.

- Nettoyer le terrain des gravats et s’en servir de remblais.

- Démolir la remise et s’en servir de remblais.

Cette solution permet d’intervenir en autarcie sur le lieu : aucun apport de matériel n’est prévu, pas de chaux, sable, graviers, ni benne à gravats.

Le mur de soutènement sera en pierre, briques et gravats de ciment secs.

En résumé :

Comme outillage : une barre à mine, des seaux, une masse, un têtu, une brouette, du cordeau et un mètre. Aucun outil thermique n’a été utilisé.

Comme matériaux : ceux qui sont sur place.

De l’huile de coude. 

 

Le chantier en images

Plan du chantier

 

Plan marseille ara

 

Tri des gravats et préparation du chantier

 

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Construction de l’extension, l’arrière du mur est remblayé au fur et à mesure que le mur monte

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Un peu plus tard

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Il n’y a plus de gravats sur le terrain. Démolition de la remise pour récupérer les gravats et continuer

 

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Un peu plus tard

 

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C’est presque fini, nettoyage final, finition terre

 

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Ouf ! les klaxons ont cessé !

 

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29 juin 2007

Voyage en Corse

La Corse est belle ! Certains de ses paysages le doivent à l’utilisation de la pierre sèche. Voici quelques clichés pris lors d’un périple dans le nord de l’île…

 

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"Poulailler aménagé dans un abri sous roche" avec enclos à Cannelle (Cap Corse)

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Détail du mur d’enclos de ce poulailler

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Toujours à Cannelle coupe d’un mur de soutènement suite à son effondrement

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Escalier à la sortie de Pino

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Un peu plus loin, toujours à Pino, entrée d’enclos datée et signée

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Restauration astucieuse d’un escalier volant avec une barre de fer plantée

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Porte fabriquée à partir d'une tête de lit métallique

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Au sommet des certains murs de soutènement, ici à Canari, des dalles sont posées à chant. Lors de la visite du musée de l’Adecec (Association pour le Développement des études archéologiques historiques linguistiques et naturalistes du centre est de la Corse) à Cervioni, j’apprendrai que ces pierres plantées sont appelées des «baroni».

Arrivés vers Morosaglia (à l’entrée de la Castaniccia) dans le Nebbiu, on peut voir des pagliaghji (pagliaghju au singulier et traduit par « pailler » en français). Un sentier guidé et commenté par l’Associu opera di Rutali  vous en fera découvrir tous les aspects à Rutali.

 

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On peut y voir ce pagliaghju dont l’enclos sert de sépultures à des soldats nord-africains tombés lors de la libération par les troupes alliées.

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La voûte à encorbellement des pagliaghji dans lesquels j’ai pu pénétrer commence à peu près à la hauteur des épaules et se termine par une couverture dallée. D’aspect modeste à l’extérieur, le volume intérieur de ces bâtiments est très spacieux, on ne s’y sent pas du tout à l’étroit.

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Des vaches s’y abritent, ce qui explique que beaucoup sont fermés par des portes en bois

 

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Pour finir et pour vous donner une idée de la solidité des pagliaghji, un chaînage d’angle en béton !

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21 septembre 2008

Le chaînage d'angle intégré

Lors de restauration ou de l’entretien de murs de soutènement à pierre sèche, j’ai souvent observé la présence en parement, de multiples chaînages d’angles. Ces chaînages sont très soignés et apparaissent pourtant comme des coups de sabre injustifiés. J’ai longtemps attribué ces traces à la présence d’anciennes guérites, ruchers, niches ou à une étape antérieure de la construction du mur. Pourtant, les chaînages courent parfois de haut en bas du mur (intégrant le couronnement) et peuvent être nombreux et espacés de façon « aléatoire » le long du mur.


Il m’est apparu que ces chaînages peuvent avoir été intégrés dans la maçonnerie et qu’ils ne renvoient pas forcément à une étape antérieure de la construction du mur ou à un vestige d’aménagement.

Ils peuvent ainsi avoir été la solution apportée lors de la restauration partielle de murs de soutènement en pierre sèche.

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                       Le chaînage d'angle de reprise dans le mur de Ganagobie (Alpes-de-Haute-Provence)

En effet, lors de telles restaurations se pose la question de garder ou non des parties de murs usagées. On choisit alors de restaurer ou non certaines parties, malgré leurs défauts, tout simplement par économie ou aujourd’hui pour leur aspect esthétique. Les parties que l’on choisit de conserver n’auront alors pas la même durée de vie que le nouveau mur.

Garder ces parties oblige à prendre des précautions particulières au niveau de la maçonnerie au point de rencontre entre le nouveau et l’ancien mur. En effet l’ancien mur est un facteur de fragilisation du mur nouvellement construit. Cette fragilisation est renforcée par la difficulté de croiser correctement les pierres du nouveau mur avec celles de l’ancien.

Confronté à une telle liaison, dans ma pratique de la pierre sèche, je renforce la structure de la maçonnerie à l’endroit où le nouveau mur rejoint l’ancien. Je croise avec davantage de précautions mes pierres à l’intérieur du mur. J’utilise également des pierres de taille plus importantes, afin de créer un point plus stable et plus solide et j’augmente la profondeur maçonnée du mur au niveau de la liaison. Tout ceci pour que la partie restaurée ne soit pas fragilisée par la liaison et pour la désolidariser des éventuelles dégradations de la partie ancienne du mur.

ganagobie-004©

 

Il me semble que ces chaînages répondent à la même préoccupation. En effet, le nouveau mur est arrêté par le chaînage qui le désolidarise de l’ancien. Ainsi, lors de l’écroulement ou la destruction de l’ancien morceau de mur, le mur restauré reste debout et n’est pas emporté. C’est lors de l’observation d’un mur de soutènement à Ganagobie (Alpes-de-Haute-Provence) que cette technique m’est apparue très clairement.

Le mur en question mesure plus de deux mètres de haut et comporte au moins deux reprises de ce genre. L’analyse de son appareillage en façade laisse apparaître de façon très évidente l’utilisation du chaînage d’angle intégré lors de la reprise du mur.

 

Article publié dans la revue d'architecture vernaculaire du CERAV.

22 avril 2012

Support théorique d'un cours "pierre sèche"

Je vous fais partager dans cet article le support théorique du cours pierre sèche donné lors de sessions de formation (notamment : au CFPPA de Carmejane à Forcalquier, Gabion à Embrun, Onze tours à Taulignan, Li bancaus d'oulivettes à Lurs, Maison de la nature des 4 frères au Beausset).

Qu’appelle-t-on la « pierre sèche » ?

Il s’agit d’un terme employé pour décrire l’ensemble des techniques d’aménagement paysager utilisant comme matériaux les éléments composant le sol, dont la pierre. Est dite « maçonnerie à pierre sèche » la réalisation d’ouvrages en pierres appareillées sans avoir recours à un quelconque mortier ou liant.

On parle alors de « maçonnerie à pierres sèches »

Il est ainsi possible de réaliser grâce aux techniques de maçonnerie à pierres sèches :

- des pierriers (aussi nommés clapiers)

- des murs (de clôture, de soutènement…)

- des accès (escaliers, rampes…)

- des sols (calade…)

- des ouvrages « hydrauliques » (puits, aiguiers, drains…)

- des bâtiments et autres ouvrages « techniques » (cabanes, séchoirs, apiés, fours...)

Par extension de vocabulaire certains murs maçonnés à la chaux ou au ciment sont nommés « pierre sèche », attention ils n’en ont que l’aspect car le maçon a pris soin de ne pas laisser apparaître le liant en parement.

Les pierres utilisées pour maçonner à pierres sèches sont généralement des pierres obtenues par cueillette ou épierrement des cultures.

Les ouvrages anciens construits en pierre sèche sont la plupart du temps construits avec des pierres d’affleurement (dites pierres de croûte). Remontées à la surface du terrain lors des travaux agricoles, elles étaient tout simplement cueillies mais pouvaient aussi être plus systématiquement extraites des couches superficielles lors de décaissements du sol. Ces pierres étaient plus ou moins préparées et souvent stockées en pierriers avant d’être utilisées.

C’est avec les seuls matériaux extraits localement du sol que les ouvrages en pierre sèche ont été réalisés depuis la sédentarisation de l’homme. La pierre sèche est en effet mise en œuvre depuis la nuit des temps notamment pour réaliser des ouvrages funéraires. Elle a connu son véritable essor au néolithique en se généralisant lors de l’extension de l’agriculture et du pastoralisme. En France, telle que nous la connaissons aujourd’hui, elle est l’héritage de la colonisation des terres de coteaux rendue nécessaire à la société paysanne à chaque expansion démographique depuis le XVIème siècle. Elle a connu son apogée à la fin du XIXème, juste avant la révolution industrielle, et son abandon suite à l’exode rural, à la mécanisation des campagnes et à l’abandon de la composante paysanne de la société.

De nos jours, l’approvisionnement en pierre pour la création de nouveaux ouvrages dépend souvent de pierres extraites de carrières. Les usages des aménagements paysagers en pierre sèche sont plutôt techniques ou d’agrément que liés à la production agricole.

 


Analyse de la structure maçonnée des murs en pierre sèche

Aucun liant/quatre règles

Sans liant ce sont le poids et les forces qui s’exercent sur et dans le mur qui vont faire la relation entre les pierres. Le but d’une maçonnerie à pierres sèches est de rendre solidaires entre elles, sous l’effet du poids et des forces, toutes les pierres d’un ouvrage.

Pour obtenir cette relation d’ensemble le murailleur applique lors de la pose de chaque pierre individuellement quatre règles de pose : l’assise, le croisement, le blocage, le pendage.

Le blocage, s’exerce pour toutes les faces d’une pierre. En jointant les pierres entre-elles, cette règle évite qu’elles puissent bouger par un jeu latéral ou rotatif sous l’effet des poussées et perdre ainsi leur positionnement.

L’assise, permet au poids de s’exercer sans déstabiliser la pierre. Elle se définit : d’une part par un bon appui sur les pierres de dessous et d’autre part par une bonne réception de l’appui des pierres du dessus (fig. 3).

Le pendage, permet de diriger le poids de la pierre et de renforcer son effet à l’intérieur du mur (fig. 4). Dans le cas d’un mur de soutènement, il a également le résultat de présenter la pierre de façon à ce que la résultante de la poussée des terres soit redirigée en renforçant la force de cohésion des pierres entre-elles (fig. 5).

Le croisement, permet de répartir le poids sur un maximum de pierres sous-jacentes, et de recevoir le poids d’un maximum de pierres sus-jacentes (fig. 1 & 2).

Ces quatre règles principales sont perfectionnées par des règles complémentaires qui les complètent, liste non exhaustive ici:.

- Au croisement et pour le parfaire dans la profondeur du mur, on pose des dispositifs de boutisses traversantes.

- Pour assurer la dernière rangée de pierre posée sur laquelle ne s’exercera aucun poids, on pose un couronnement adapté.

- Pour permettre une assise optimum à la première rangée de pierre posée on fait des fondations s’appuyant sur un sol susceptible de recevoir le poids de l’ouvrage sans s’affaisser.

- On maçonne systématiquement les pierres en boutisse, action qui optimise l’effet du pendage et redistribue le poids vers l’intérieur du mur.

- La pose en pendage crée un fruit qui évide le mur au niveau du parement des fondations. Ceci réduit localement le poids retarde le renversement du mur.

Une cinquième règle, le parement, n’a pas d’effet sur la solidité du mur, c’est pourtant une règle primordiale qui touche à l’esthétique des ouvrages en pierre sèche. C’est cette dernière règle qui a permis un renouveau de la maçonnerie à pierres sèches de nos jours et qui fait que beaucoup préfèrent l’esthétique d’un mur en pierre sèche à celle d’un mur en béton.

L’ouvrage en pierre sèche est un monolithe

Les quatre règles ont pour but de mettre en œuvre le poids et les poussées qui s’exercent dans et sur le mur comme principe de cohésion entre les pierres. Elles sont appliquées et se vérifient à chaque pierre individuellement. Les forces ainsi dirigées assemblent toutes les pierres de la structure maçonnée en une seule entité.

Si les quatre règles sont réunies pour chaque pierre posée, toutes les pierres seront reliées entre elles et interagiront dans la structure sans rupture. Aucune pierre ne peut bouger alors sans conséquence sur les autres. Cette structure peut être considérée comme un monolithe composé de toutes les pierres. Mais un monolithe souple, capable de se déformer à chaque rupture formée par chacune des faces des pierres.


Une fois la structure achevée et lestée par le poids du couronnement, il n’est donc pas possible de faire bouger une pierre. Chaque pierre est en relation avec toutes les autres. Bouger une pierre, l’extraire de la structure, si l’on prend la métaphore du tissus, équivaut alors à mailler une structure tissée. A partir de ce point, toute la structure est déstabilisée à plus ou moins long terme, elle file.

 

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Fig.1 (règle du croisement)

 

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Fig.2 (règle du croisement)

 

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Fig.3 (règle de l’assise)

 

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Fig.4 (le pendage)    

 

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Fig.5 (le pendage) 

 


Particularité des soutènements

Un mur de soutènement en pierre sèche est la plupart du temps analysé en deux parties : Le mur maçonné et le drain. Ces deux éléments forment le dispositif de soutènement.

Le mur est maçonné selon les règles vues plus haut, il est lui-même drainant. Le drain est pour sa part composé dans la plupart des cas de cailloutis plus ou moins appareillés. Ce dernier est en général mis en place entre le sol et le mur comme un éboulis stabilisé. Contrairement à l’effet recherché dans le placement des pierres pour le mur, le murailleur construit le drain afin de générer le maximum de vide entre les pierres, et de créer une structure souple dont chaque pierre est autant que possible indépendante des autres dans son mouvement. Quoique souple, la structure du drain ne doit pas permettre de tassements ou d’affaissements ultérieurs.

Le drain a plusieurs rôles :

Le drainage, comme sont nom l’indique. Le drain assainit l’arrière du mur et draine les écoulements d’eau. Cette fonction a également un effet sur la durée de vie des pierres composant le mur, en asséchant l’arrière du mur il évite aux pierres de la maçonnerie de s’imbiber d’humidité ce qui est particulièrement salutaire pour les pierres gélives.

Zone tampon. Par sa structure il amortit les poussées lors du gonflement des sols. Il empêche ainsi ces poussées d’agir directement sur la partie maçonnée. Il désolidarise ainsi le mur du sol.

Le filtrage, la menace la plus sérieuse pour la pérennité de la structure maçonnée en pierre sèche est l’infiltration des particules de sol. Sa solidité réside dans le vide entre les pierres. Le drain retarde l’infiltration des particules de sol dans la maçonnerie et optimise la durée de vie du mur. Il est aujourd’hui coutumier de placer un géotextile entre le sol et le drain, celui-ci permet à l’eau de s’écouler dans le drain mais ne laisse pas passer la terre.

Visitez ce lien pour approfondir le sujet.

Le dispositif de drainage à l’arrière d’un mur de soutènement en pierre sèche est primordial pour assurer une durée optimale à un soutènement en pierre sèche.

Ceci-dit, dans les faits, les entités drain et mur ne sont pas toujours si évidemment démarqués, il est aussi possible dans certains terroirs de rencontrer des murs déjà anciens dépourvus de drains, le mur se suffisant alors à lui-même.

Ces différences sont liées à une adaptation aux sols et au stock de pierre disponibles.


La pierre

 

 

croquis 072©

Fig.1 

Si ce n’est pas le seul matériau constitutif des aménagements en pierre sèche, c’est bien le seul et unique utilisé pour maçonner à pierre sèche.

Le murailleur considère principalement la pierre comme un volume. Sa forme, sa taille, son poids, sa matière déterminent son utilité dans l’édifice.

Forme : L’éventail des formes que prennent les pierres est large, il dépend de la nature géologique du sol dont elles ont été extraites et des évènements climatiques et environnementaux qu’elles ont subis. Le murailleur adapte sa maçonnerie à la forme des pierres dont il dispose pour réussir à construire selon les 5 règles. Il trie et réserve également certaines pierres selon leur forme afin de les utiliser à des taches particulières dans l’ouvrage (parement/arrière du mur, mur/drain, couronnement, claveau, boutisses traversantes, pierres d’angle, cales, etc.).

Toute pierre, à moins d’être un pavé ou un galet sphérique, peut s’inscrire mentalement dans un parallélépipède (fig.1). Ceci détermine pour chaque pierre, six faces, une longueur, une largeur. La pierre ainsi perçue sera disposée afin de respecter des faces d’assise, des faces de joint, et éventuellement de parement ainsi que la pose en boutisse ou panneresse (fig.2).

 

croquis 046©

Fig.2

 

Taille et poids : Les plus petites servent à caler ou à remplir le drain, les plus grosses servent en général à encadrer la maçonnerie (fondation, couronnement, chaînages d’angle) ou à la renforcer (boutisse traversantes, linteau, contrepoids). Entre les deux, les pierres moyennes, dites pierres à bâtir.

La taille détermine le poids de la pierre, ce qui explique que le couronnement soit composé de gros volumes dès que la ressource en pierre le permet.

Certaines pierres sont d’une matière plus fragile ou moins pérenne, elles seront placées en fonction dans l’ouvrage.

 

Bibliographie sommaire :

AMBROISE, Régis ; FRAPA, Pierre ; GIORGIS, Sébastien. Paysages de terrasses. Aix-en-Provence, Edisud, 1989. 189p.

BLANCHEMANCHE, Philippe. Bâtisseurs de paysages : terrassement, épierrement et petite hydraulique agricole en Europe du XVIIe au XIXe siècle. Paris, Maison des Sciences de l’Homme, 329p.

BROMBERGER, Christian ; LACROIX, Jacques ; RAULIN, Henri. L’architecture rurale française : Provence. Paris, Berger-Levrault, 1980, 357p.

BROOKS, Alan ; ADCOCK, Sean. Dry stone walling: a practical handbook. Ed. British Trust for Conservation Volunteers, 2004, 160 p.(attention ouvrage en anglais)

CAGIN, Louis ; NICOLAS, Laetitia. Construire et aménager en Pierre sèche. Paris, Eyrolles, 2010

CAPEB. Pierre sèche. Lyon, ENTPE, 2008, 157p.

COIGNET, Jean ; COIGNET, Laurent. Maçonnerie de pierre : matériaux et techniques, désordres et interventions. Paris, Eyrolles, coll. Au pied du mur, 2007, 116 p.

COSTE, Pierre ; MARTEL, Pierre. Pierre sèche en Provence. Mane, Les Alpes de lumière, n°89/90, 1986, 94p.

COSTE, Pierre ; SETTE, René ; CORNU, Claire ; LARCENA, Danièle ; EMERY, François-Xavier. Pierre sèche. Manosque, Le Bec en l’air, 2008, 160 p.

Fondation Actions en Faveur de l’Environnement. Murs de pierres sèches. Manuel pour la construction et la réfection. Vienne, Ed. Haupt, 1996, 83 p.

LASSURE, Christian. La maçonnerie à pierres sèches : vocabulaire. CERAV, coll. Études et recherches d’architecture vernaculaire, n°22, 2002, 53 p.

LASSURE, Christian. La pierre sèche mode d’emploi. Paris, Eyrolles, coll. Chantiers pratiques, 2008, 72 p.

LASSURE, Christian ; REPERANT, Dominique. Cabanes en pierre sèche de France. Aix-en-Provence, Edisud, 2004, 247 p.

MAGNAUDEIX, Irène. Pierres assises, pierres mouvantes. Mane, Les Alpes de lumière, n°144, 2002, 191 p.

MASSOT, Jean-Luc. Maisons rurales et vie paysanne en Provence. Arles, Actes Sud, 2004, 287 p.

Musée des Arts et Traditions Populaires de Draguignan. La pierre apprivoisée : la pierre sèche dans le Var. Draguignan, Musée des ATP, 2005, 35 p. (épuisé, consultable sur internet)

ROUVIERE, Michel. La restauration des murs de soutènement de terrasses. Parc National des Cévennes, coll. Les cahiers pratiques, 2002, 40 p.

SETTE, René ; PAVIA, Fabienne. Calades : les sols de pierre en Provence. Manosque, Le Bec en l’air, 2002, 128 p.

VILLEMUS, Boris. Étude des murs de soutènement en maçonnerie de pierres sèches. Thèse de doctorat, Institut National des Sciences Appliquées, Lyon, 2004, 225 p. (consultable sur internet)

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Sites internet français spécialisés pierre sèche :

http://www.pierreseche.com

Site très complet créé et mis à jour par Christian Lassure, historien, spécialiste de la pierre sèche. Vous y trouverez tout ce qui a trait à l’histoire de la technique de la pierre sèche, un journal de la pierre sèche et plus encore ...

http://www.pierreseche.net

Site créé et animé par Gilles Fichou (association Pierres d’Iris). Très complet lui aussi et très complémentaire avec celui de Christian Lassure car on y trouve davantage d’informations pratiques, (carrière, répertoire de maçon…)

http://pierreseche.over-blog.com

Blog pierre sèche, conçu comme un carnet de réalisations d’un maçon de pierre sèche.

Vous trouverez sur ces trois sites de nombreux autres liens qui vous donneront accès à la majeure partie de ce qui a trait à la pierre sèche sur le net.

 

Mis à jour le 16 juillet 2015

 

28 juin 2008

Petite histoire imaginaire de la pierre sèche

Le cycle des pierres

A l’origine des pierres, il y a des masses de matière, des magmas, des lits de sédiments, des concrétions, oubliés du temps, endormis à des profondeurs variables. Ils sont conservés dans un devenir ralenti car plus ou moins protégés des accidents, du contact d’autres éléments ...

 

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Voûte « naturelle » en pierre à Pontarlier (Doubs).

Le processus est hors de l’échelle humaine, aussi bien dans la dimension spatiale que temporelle. Hors d’échelle elle l’est également dans l’infiniment petit. En effet le moindre accident, même microscopique lors de la prise de la lave, ou d’un dépôt de matières traînées par le courant, laissera sa marque dans la structure, et le moment venu (si longtemps après), celle-ci en révèlera la mémoire et en aura gardé les informations.

Cette matière est le socle de tout paysage, le substrat sur lequel nous évoluons, si homogène et pourtant nulle part exactement le même. Des magmas divers et successifs formant aussi bien les montagnes, les plaines que les fonds marins.

Ces magmas devenus solides se déchirent, cassent, il s’en détache de petits ou gros bouts au gré des accidents survenus à la masse originelle. Aucun de ces bouts n’est le même lors de sa rupture. Aucun n’aura le même devenir le même chemin pour achever son cycle et réintégrer un nouveau magma. Il pourra être montagne, puis blocs, galets, poussières entraînées par le vent, dissoutes au passage de l’eau, broyées par la pression, re-cimentées dans une autre matière.

Chaque structure se décline et se recombine ainsi sans arrêt.

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Mur « naturel » à Ganagobie (Alpes-de-Haute-Provence).

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Le même, poursuivi par un mur en pierre sèche maçonné par l’homme.

Le passage du magma aux pierres, un modèle pour construire

Il est un moment très intéressant dans cette évolution historique, c’est celui où le magma mis à nu, exposé à notre regard, a conservé son volume mais est déjà cisaillé, débité, morcelé, délité en de multiples parties, que l’on appelle « des pierres ».

Dans cet émiettement s’exprime toute l’histoire du magma, des particularités de sa genèse à celle des évènements qu’il a subi.

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Ancienne carrière de Baume-les-Dames (Doubs).

A ce moment, les pierres, bien que déjà individualisées, sont alors encore assemblées en une même structure. L’ensemble est déjà composé de pièces détachées mais garde la stabilité et la forme initiale.

 

C’est déjà en quelque sorte des murs.

 

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« Mur-magma »  par l’architecte Claude-Nicolas Ledoux à l’entrée des Salines Royales d’Arc-et-Sénans (Doubs).

Il semble que l’homme a bâti à pierres sèches au moins depuis qu’il est "habilis".

On retrouve des fondations de murs en pierre sèche sur tous les continents et à tous les âges de l’humanité.

La source de ce geste (poser des pierres les unes sur les autres en équilibre stable) est peut être à rechercher dans l’observation de ces morceaux de magma fissurés.

Si tel est le cas, maçonner à pierres sèche (si on le fait sans débauche d’outils)  est de l’ordre du « geste archéologique ».

Réaliser le geste, pierre après pierre, c’est le réaliser dans les mêmes conditions et de la même façon que les premiers agriculteurs du néolithique.

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Reconstitution d'un habitat néolithique, exposition archéologique,
aire d'autoroute de Caissargues, A51.

Au niveau du geste lui-même, peut-il être question d’évolution ?

En dehors de l’utilisation d’outils (par exemple un tracto-pelle pour réaliser un empierrement), quelle nouvelle découverte peut enrichir cette acte simple d’empiler des pierres afin de reproduire l’équilibre proposé par cet état originel du magma ?

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Mur en pierre sèche sur roc à Ornans (Doubs).

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Mur en pierre sèche sur roc clôturant une ancienne carrière à Taulignan (Drôme).

 

 Mis à jour :  13 VIII 08.

 

 

 

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